Qu’est ce que le gaz et comment est-il utilisé ?

Le gaz naturel occupe une place prépondérante dans le paysage énergétique mondial. Cette ressource fossile, formée il y a des millions d'années, joue un rôle crucial dans de nombreux secteurs, de l'industrie lourde aux foyers domestiques. Son utilisation soulève des questions importantes sur l'avenir énergétique et environnemental de notre planète. Comprendre la nature du gaz, ses applications variées et les enjeux qui l'entourent est essentiel pour appréhender les défis énergétiques actuels et futurs.

Composition chimique et propriétés physiques du gaz naturel

Le gaz naturel est principalement composé de méthane (CH4), un hydrocarbure simple constitué d'un atome de carbone et de quatre atomes d'hydrogène. Cette molécule confère au gaz naturel des propriétés uniques qui expliquent son utilisation répandue. On trouve également dans sa composition, en proportions variables, d'autres hydrocarbures plus lourds comme l'éthane, le propane et le butane, ainsi que des gaz inertes tels que l'azote et le dioxyde de carbone.

L'une des caractéristiques remarquables du gaz naturel est son pouvoir calorifique élevé. En effet, la combustion d'un mètre cube de gaz naturel libère environ 10 kWh d'énergie, ce qui en fait une source d'énergie particulièrement efficace. Cette propriété explique son utilisation privilégiée dans les applications nécessitant une forte puissance calorifique, comme le chauffage industriel ou la production d'électricité.

À l'état naturel, le gaz est inodore et incolore. Pour des raisons de sécurité, un agent odorant, généralement du tétrahydrothiophène (THT), est ajouté pour permettre sa détection en cas de fuite. Cette mesure est cruciale pour prévenir les accidents domestiques ou industriels liés aux fuites de gaz.

Extraction et traitement du gaz : du puits au réseau

L'exploitation du gaz naturel commence par son extraction des gisements souterrains. Ces réservoirs, formés au fil des millénaires, peuvent se trouver à des profondeurs allant de quelques centaines de mètres à plusieurs kilomètres sous la surface terrestre ou marine. L'extraction du gaz est un processus complexe qui a connu des avancées technologiques significatives au cours des dernières décennies.

Techniques de forage horizontal et fracturation hydraulique

Les techniques de forage ont considérablement évolué, permettant d'accéder à des réserves auparavant inexploitables. Le forage horizontal, combiné à la fracturation hydraulique, a révolutionné l'industrie gazière, notamment aux États-Unis. Cette méthode consiste à forer verticalement jusqu'à la couche rocheuse contenant le gaz, puis à dévier le forage horizontalement pour maximiser la surface de contact avec le réservoir.

La fracturation hydraulique, quant à elle, implique l'injection d'un mélange d'eau, de sable et de produits chimiques à haute pression pour créer des fissures dans la roche et libérer le gaz piégé. Bien que controversée pour ses impacts environnementaux potentiels, cette technique a permis d'accéder à d'importantes réserves de gaz de schiste, modifiant profondément le paysage énergétique mondial.

Procédés de séparation des hydrocarbures (cryogénie, absorption)

Une fois extrait, le gaz brut doit être traité pour répondre aux normes de qualité requises pour son transport et son utilisation. La séparation des différents composants du gaz naturel est une étape cruciale de ce processus. Deux méthodes principales sont employées : la cryogénie et l'absorption.

La cryogénie consiste à refroidir le gaz à des températures extrêmement basses, provoquant la condensation et la séparation des hydrocarbures plus lourds. Cette technique est particulièrement efficace pour la production de gaz naturel liquéfié (GNL), utilisé pour le transport maritime sur de longues distances.

L'absorption, quant à elle, utilise des solvants chimiques ou physiques pour capturer sélectivement certains composants du gaz. Cette méthode est souvent privilégiée pour l'élimination du dioxyde de carbone et du sulfure d'hydrogène, améliorant ainsi la qualité du gaz final.

Désulfuration et élimination du CO2 : le cas de lacq en france

La désulfuration du gaz naturel est une étape essentielle du traitement, visant à réduire les émissions de dioxyde de soufre lors de la combustion. Le gisement de Lacq, en France, a été pionnier dans ce domaine. Découvert en 1951, ce gisement contenait un gaz particulièrement riche en hydrogène sulfuré (H2S), nécessitant un traitement spécifique.

Le procédé développé à Lacq impliquait l'oxydation de l'H2S en soufre élémentaire, qui pouvait ensuite être valorisé dans l'industrie chimique. Cette innovation a non seulement permis l'exploitation du gisement mais a également positionné la France à l'avant-garde des technologies de traitement du gaz acide.

Compression et transport par gazoducs : le réseau européen ENTSOG

Le transport du gaz naturel sur de longues distances se fait principalement par gazoducs. Ces réseaux de canalisations s'étendent sur des milliers de kilomètres, reliant les zones de production aux centres de consommation. La compression du gaz est nécessaire pour maintenir sa pression et assurer son déplacement dans les conduites.

En Europe, le réseau de transport de gaz est coordonné par l'ENTSOG (European Network of Transmission System Operators for Gas). Cette organisation assure l'interconnexion et l'interopérabilité des réseaux nationaux, facilitant les échanges transfrontaliers de gaz. Le réseau européen comprend plus de 200 000 km de gazoducs haute pression, jouant un rôle crucial dans la sécurité énergétique du continent.

Applications industrielles du gaz naturel

Le gaz naturel trouve de nombreuses applications dans l'industrie, où sa versatilité et son efficacité énergétique en font une ressource précieuse. Son utilisation s'étend de la production d'électricité à la fabrication de produits chimiques, en passant par des processus industriels spécifiques.

Production d'électricité : centrales à cycle combiné vs. centrales thermiques

Dans le secteur de la production d'électricité, le gaz naturel a gagné en importance ces dernières décennies, notamment grâce au développement des centrales à cycle combiné. Ces installations offrent un rendement nettement supérieur aux centrales thermiques classiques, atteignant jusqu'à 60% contre environ 35% pour une centrale à charbon traditionnelle.

Le principe du cycle combiné repose sur l'utilisation de deux turbines : une turbine à gaz et une turbine à vapeur. Le gaz est d'abord brûlé pour actionner la turbine à gaz, produisant de l'électricité. Les gaz d'échappement, encore très chauds, sont ensuite utilisés pour produire de la vapeur qui alimente une seconde turbine, générant ainsi de l'électricité supplémentaire. Cette technologie permet une utilisation plus efficace de l'énergie contenue dans le gaz, réduisant les émissions de CO2 par kilowattheure produit.

Utilisation comme matière première pétrochimique (méthanol, ammoniac)

Au-delà de son rôle de combustible, le gaz naturel est une matière première essentielle pour l'industrie pétrochimique. Le méthane, principal composant du gaz naturel, est utilisé pour produire du méthanol et de l'ammoniac, deux produits chimiques fondamentaux.

Le méthanol, obtenu par réaction du méthane avec de la vapeur d'eau et de l'oxygène, sert de base à la fabrication de nombreux produits, des plastiques aux carburants alternatifs. L'ammoniac, quant à lui, est produit par le procédé Haber-Bosch, combinant l'azote de l'air avec l'hydrogène issu du gaz naturel. Il est principalement utilisé dans la fabrication d'engrais, jouant un rôle crucial dans l'agriculture moderne.

Le gaz naturel dans la sidérurgie : procédé de réduction directe HYL

L'industrie sidérurgique, traditionnellement grande consommatrice de charbon, se tourne de plus en plus vers le gaz naturel pour réduire son empreinte carbone. Le procédé de réduction directe HYL, développé au Mexique, illustre cette tendance. Cette technologie utilise le gaz naturel pour produire du fer directement à partir du minerai, sans passer par la phase de fusion du haut fourneau.

Dans ce procédé, le gaz naturel est d'abord converti en un mélange de monoxyde de carbone et d'hydrogène, appelé gaz de synthèse. Ce gaz réagit ensuite avec le minerai de fer pour produire du fer métallique, éliminant ainsi le besoin en coke, un dérivé du charbon très polluant. Cette méthode permet de réduire significativement les émissions de CO2 par tonne d'acier produite.

Le gaz dans le secteur résidentiel et tertiaire

Le gaz naturel joue un rôle prépondérant dans le secteur résidentiel et tertiaire, principalement pour le chauffage, la production d'eau chaude et la cuisson. Son utilisation dans ces domaines a évolué avec le développement de technologies plus efficaces et respectueuses de l'environnement.

Chauffage et eau chaude : chaudières à condensation vs. pompes à chaleur gaz

Dans le domaine du chauffage résidentiel, les chaudières à condensation représentent une avancée significative en termes d'efficacité énergétique. Ces chaudières récupèrent la chaleur latente contenue dans les fumées de combustion, permettant d'atteindre des rendements supérieurs à 100% sur le pouvoir calorifique inférieur du gaz. Elles consomment ainsi moins de gaz pour produire la même quantité de chaleur qu'une chaudière traditionnelle.

Les pompes à chaleur gaz, quant à elles, offrent une alternative encore plus performante. Elles combinent un cycle thermodynamique, similaire à celui d'un réfrigérateur, avec un moteur à gaz pour produire chaleur et eau chaude. Ces systèmes peuvent atteindre des coefficients de performance élevés, réduisant considérablement la consommation de gaz tout en assurant un confort optimal.

Cuisson : plaques de cuisson et fours au gaz

Dans la cuisine, le gaz naturel reste apprécié pour ses qualités de cuisson. Les plaques de cuisson au gaz offrent un contrôle précis et instantané de la température, prisé par les cuisiniers professionnels et amateurs. La flamme visible permet une meilleure appréciation de la cuisson, tandis que la répartition uniforme de la chaleur assure une cuisson homogène.

Les fours à gaz, bien que moins répandus que leurs homologues électriques dans les cuisines modernes, conservent des avantages spécifiques. Ils chauffent plus rapidement et créent une atmosphère légèrement humide, bénéfique pour certaines préparations comme les rôtis. Cependant, l'évolution des technologies de cuisson électrique, notamment l'induction, tend à réduire l'écart de performance entre les deux types d'appareils.

Climatisation par absorption : technologie GHP de yanmar

La climatisation au gaz, bien que moins connue, offre des solutions intéressantes, particulièrement dans le secteur tertiaire. La technologie GHP (Gas Heat Pump) développée par Yanmar illustre ce potentiel. Ces systèmes utilisent un moteur à gaz pour entraîner un compresseur de réfrigérant, plutôt qu'un moteur électrique comme dans les climatiseurs conventionnels.

L'avantage principal des GHP réside dans leur capacité à fonctionner efficacement même par temps froid, contrairement aux pompes à chaleur électriques dont les performances se dégradent à basse température. De plus, en récupérant la chaleur du moteur à gaz, ces systèmes peuvent produire simultanément du froid et du chaud, augmentant leur efficacité globale. Cette technologie trouve son application dans les grands bâtiments tertiaires, où elle peut contribuer à réduire la demande en électricité pendant les pics de consommation estivaux.

Gaz naturel pour véhicules (GNV) : une alternative aux carburants pétroliers

Le gaz naturel pour véhicules (GNV) se présente comme une alternative intéressante aux carburants pétroliers traditionnels dans le secteur des transports. Utilisé sous forme comprimée (GNC) ou liquéfiée (GNL), le GNV offre plusieurs avantages environnementaux et économiques.

Sur le plan environnemental, les véhicules au GNV émettent moins de particules fines et d'oxydes d'azote que leurs équivalents diesel. Les émissions de CO2 sont également réduites d'environ 20% par rapport à l'essence. Ces caractéristiques en font une option attrayante pour les flottes urbaines, comme les bus ou les véhicules de livraison, particulièrement dans les zones soumises à des restrictions de circulation pour cause de pollution.

Le développement du GNV fait face à certains défis, notamment le manque d'infrastructures de ravitaillement. Cependant, des initiatives comme le projet BioGNVAL en France, qui vise à produire du biométhane à partir de boues d'épuration pour alimenter des véhicules, illustrent le potentiel de cette technologie dans une perspective de transition énergétique.

Enjeux environnementaux et transition énergétique

L'utilisation du gaz naturel soulève des questions importantes dans le contexte de la transition énergétique et de la lutte contre le changement climatique. Bien que moins polluant que le charbon ou le pétrole, le gaz naturel reste une source d'émissions de gaz à effet de serre significative.

Émissions de gaz à effet de serre : comparaison avec le charbon et le pétrole

Le gaz naturel émet environ

40% à 50% moins de CO2 que le charbon pour une même quantité d'énergie produite. Cette différence s'explique par la composition chimique du gaz naturel, principalement constitué de méthane (CH4), qui contient proportionnellement plus d'hydrogène et moins de carbone que le charbon ou le pétrole.

Cependant, il est important de noter que les émissions de méthane lors de l'extraction, du transport et de la distribution du gaz naturel peuvent réduire cet avantage. Le méthane est en effet un puissant gaz à effet de serre, avec un potentiel de réchauffement global 28 fois supérieur à celui du CO2 sur une période de 100 ans. La réduction des fuites de méthane tout au long de la chaîne d'approvisionnement est donc un enjeu crucial pour maximiser les bénéfices climatiques du gaz naturel.

Développement du biométhane : l'exemple du projet BioGNVAL

Le biométhane, produit à partir de la méthanisation de déchets organiques, représente une voie prometteuse pour réduire l'empreinte carbone du gaz naturel. Le projet BioGNVAL, mené en France, illustre le potentiel de cette technologie dans le secteur des transports.

Lancé en 2017 à la station d'épuration de Valenton (Val-de-Marne), BioGNVAL transforme les boues d'épuration en biométhane utilisable comme carburant pour véhicules. Le procédé comprend plusieurs étapes : la méthanisation des boues produit du biogaz, qui est ensuite épuré pour obtenir du biométhane de qualité comparable au gaz naturel. Ce biométhane est alors comprimé pour être utilisé comme carburant dans des bus et des bennes à ordures.

Ce projet pilote démontre la faisabilité d'une économie circulaire dans le domaine de l'énergie, où les déchets d'une communauté sont transformés en carburant propre pour ses véhicules. Il contribue ainsi à réduire les émissions de gaz à effet de serre tout en valorisant des ressources locales.

Power-to-gas : stockage d'électricité renouvelable sous forme de méthane de synthèse

La technologie Power-to-Gas (P2G) émerge comme une solution innovante pour le stockage de l'électricité renouvelable excédentaire. Ce procédé permet de convertir l'électricité en gaz, offrant ainsi une réponse à l'intermittence des énergies renouvelables comme l'éolien et le solaire.

Le principe du P2G repose sur deux étapes principales. D'abord, l'électrolyse de l'eau utilise l'électricité excédentaire pour produire de l'hydrogène. Ensuite, cet hydrogène peut être combiné avec du CO2 (capturé par exemple dans des fumées industrielles) pour produire du méthane de synthèse, chimiquement identique au gaz naturel.

L'avantage majeur de cette technologie est sa capacité à utiliser les infrastructures gazières existantes pour le stockage et le transport de l'énergie. Le méthane de synthèse peut être injecté directement dans le réseau de gaz naturel, offrant ainsi une solution de stockage à grande échelle et à long terme pour l'électricité renouvelable.

Des projets pilotes de P2G sont en cours de développement dans plusieurs pays européens. Par exemple, le projet STORE&GO, financé par l'Union européenne, explore la faisabilité technique et économique de cette technologie à travers trois sites de démonstration en Allemagne, en Suisse et en Italie.

Bien que prometteuse, la technologie P2G fait face à des défis importants, notamment en termes d'efficacité énergétique et de coûts. Le rendement global du processus (de l'électricité au méthane, puis du méthane à l'électricité) est actuellement d'environ 30%, ce qui soulève des questions sur sa viabilité économique à grande échelle. Cependant, les avancées technologiques et la baisse des coûts des énergies renouvelables pourraient rendre cette solution plus attractive à l'avenir.

En conclusion, le gaz naturel occupe une position complexe dans le paysage énergétique actuel. Moins polluant que le charbon et le pétrole, il est souvent considéré comme une énergie de transition. Cependant, pour jouer pleinement ce rôle, l'industrie gazière doit relever plusieurs défis : réduire les émissions de méthane tout au long de la chaîne d'approvisionnement, développer la production de biométhane, et explorer des technologies innovantes comme le Power-to-Gas. Ces évolutions sont essentielles pour que le gaz naturel contribue efficacement à la transition vers un système énergétique plus durable, tout en répondant aux besoins croissants en énergie de notre société.

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